L’île des Bienheureux (7)

Autour de Tim, à cet instant, rien n’avait changé. Toutes les personnes qui l’entouraient étaient figées dans leurs mouvements. Mais le jeune garçon n’y prêtait pas attention. Non, ce qu’il regardait fixement, c’était un drôle de personnage surgi d’on ne sait où. L’homme était vêtu d’une combinaison argentée sur laquelle s’étalait une multitude de montres, petites ou grandes, qui indiquaient toutes une heure différente. Le plus étrange, c’était une sorte d’antenne lumineuse qui coiffait le dessus de sa tête et qui émettait un sifflement léger. L’inconnu allait d’un bout à l’autre de la table, observant avec angoisse les visages immobiles. De temps à autre, il saisissait une de ses montres dont il déplaçait les aiguilles avant de se concentrer de nouveau sur l’assemblée inerte. À aucun moment, il ne parut se rendre compte de la présence de Tim. Puis il commença à bouger de plus en plus vite, jusqu’à disparaître mystérieusement.

Ce fut la première rencontre de Tim avec un des horlogers de Kronos. À partir de ce jour, il en vit de plus en plus souvent, de plus en plus nombreux… Il y avait les rapides qui n’apparaissaient que lors des ralentissements ou des arrêts du temps. Les lents, à l’inverse, n’intervenaient que pour les accélérations. La seule chose qui les distinguait, c’était la couleur de leurs combinaisons : argentées ou dorées. Tim s’interrogeait beaucoup sur ces inquiétants personnages. Leur présence, désormais continuelle, l’agaçait même un peu et lui gâchait le plaisir d’agir sur le temps. Puis, à la longue, il finit par s’y habituer, d’autant plus facilement que les horlogers ne semblaient pas le voir…

Malheureusement pour notre jeune garçon, l’arrivée d’un ordinateur au foyer pour Noël précipita les événements. Les premiers jours, il n’eut guère l’occasion d’essayer ce nouvel objet car c’était le cadeau de son père. Mais, lorsque les vacances s’achevèrent, il attendit tranquillement le mercredi pour pouvoir disposer de l’appareil. Ce n’est qu’au bout de plusieurs semaines qu’il découvrit par hasard la fonction « horloge ». Lorsqu’il vit les chiffres donnant l’heure, l’idée folle d’agir sur leur déroulement s’imposa très vite à son esprit. Il résista quelques jours, craignant de détraquer l’ordinateur. Mais la tentation était forte. Puis il finit par se dire :

Que je suis bête ! On doit bien pouvoir changer l’heure ! Alors… Un peu ou beaucoup, ça doit bien être prévu !

À suivre…

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